dimecres, 2 de juliol del 2025

ATENCIÓ!!!!!: Les politiques d’expulsion de Trump poussent les Latino-Américains vers l’Espagne*

Le Devoir, 2.07,2025

Romain Chauvet (des de Madrid, compte!)

Le durcissement des politiques migratoires et l’offensive menée par Donald Trump contre les Latino-Américains aux États-Unis ont des conséquences de l’autre côté de l’Atlantique. Depuis plusieurs mois, l’Espagne enregistre une augmentation significative d’arrivées de Latino-Américains, laissant derrière eux leur rêve américain.

César David vivait à Long Island jusqu’au mois de mars. Muni d’un permis de travail, ce camionneur parcourait les routes américaines et canadiennes pour livrer des matériaux de construction. Mais tout a basculé avec le retour de Trump à la Maison-Blanche.

« Un jour, ma compagnie m’a dit : “On doit te licencier, car on a moins de clients en raison des tensions avec le Canada et parce que tu es Latino, les risques sont trop grands” », raconte ce Colombien de 26 ans, encore sous le coup de l’émotion. « Même si j’étais en règle, je devenais un problème pour eux, simplement en étant Latino. »

La multiplication des arrestations et des déportations de Latinos a peu à peu provoqué un climat de crainte au sein de la communauté, même pour ceux ayant un statut officiel. « J’avais peur, très peur. Tu peux juste sortir à l’épicerie et tu ne sais pas ce qui peut arriver », explique le jeune homme, dont de nombreux amis mexicains ont fui les grandes métropoles états-uniennes vers des endroits reculés, par peur des autorités.

Ne trouvant pas d’autre emploi, il a pris la décision de venir en Espagne il y a deux mois. « Il n’y a plus de rêve américain, tout le monde veut partir maintenant. » À son arrivée à Madrid, César a déposé une demande d’asile. Sans papiers pour travailler, il a quand même réussi à trouver un petit boulot dans un centre d’appels. « Ce n’est pas l’idéal, ça ne paye pas beaucoup comme aux États-Unis, mais en attendant, je n’ai pas trop le choix. Mais j’ai hâte de retrouver une certaine liberté. »

De plus en plus de Latinos en Espagne
L’Espagne a déjà enregistré une augmentation du nombre de Vénézuéliens demandant l’asile au premier trimestre de 2025, avec 23 724 demandes. Une augmentation de 54 % par rapport à la même période l’an dernier.

« Ce n’est que le début », prévient Ana María Diez, cofondatrice et présidente de la Coalición por Venezuela, une fédération internationale d’ONG vénézuéliennes de migrants et de réfugiés. « Beaucoup ont maintenant peur d’aller aux États-Unis, avec les discours xénophobes et la campagne de haine menée par Trump. Ils abandonnent leur rêve américain pour essayer de poursuivre maintenant le rêve européen, et évidemment, la porte d’entrée est l’Espagne. »

Le pays est une destination de choix pour les Latino-Américains, qui parlent la même langue et connaissent aussi déjà la culture. De plus, la majorité d’entre eux n’ont pas besoin de visa pour venir en tant que touriste pendant moins de 90 jours. La récente décision de la Cour suprême d’autoriser le gouvernement Trump à mettre fin aux protections contre l’expulsion de quelque 350 000 Vénézuéliens pourrait aussi en pousser d’autres à rejoindre l’Espagne.

Gonzalo (nom d’emprunt) est arrivé il y a seulement quelques semaines à Madrid. Ce Vénézuélien de 40 ans préfère rester anonyme par peur de représailles dans son pays en raison de ses engagements politiques. Le retour de Trump a aussi bousculé ses plans, lui qui envisageait de traverser la frontière illégalement depuis le Mexique.

« Sous Biden, c’était déjà difficile, mais c’était possible d’y parvenir. Mais maintenant, avec Trump, c’est presque impossible », explique-t-il, ajoutant qu’un de ses amis est mort noyé en tentant de faire la traversée. « Tous mes amis aux États-Unis m’ont déconseillé de venir, c’est devenu trop dangereux. »

Gonzalo espère bénéficier de la loi espagnole qui permet aux enfants et petits-enfants de migrants d’origine espagnole de demander la citoyenneté. En cas de refus, il demandera l’asile. Il se dit prêt à tout pour obtenir une meilleure vie et pour faire venir sa femme et ses deux enfants avec lui en Espagne. « On doit faire des sacrifices, on n’a pas le choix. Mais c’est difficile, je ne sais pas où je vais dormir dans les prochaines semaines. J’espère qu’avec la saison touristique, je trouverai un petit boulot au noir. »

Système saturé
Neyvi Tolentino, avocate en immigration dans la capitale espagnole, croule sous les demandes d’information depuis le retour de Trump. « L’Espagne offre la possibilité de se régulariser après deux ans de séjour sans papiers sur le territoire. C’est quelque chose d’assez unique dans l’Union européenne (UE) et qui n’existe pas aux États-Unis. Ça attire beaucoup », explique l’avocate.

Elle dit recevoir tous types de demandes, allant du visa de travail au visa de nomade numérique, ou encore des demandes d’asile. Mais les délais de traitement pour cette dernière procédure explosent. Le système est saturé et serait au bord de l’effondrement, selon des employés. L’Espagne doit récemment faire face à une vague inédite de migrants qui cherchent à entrer en Europe par les îles Canaries, en raison des contrôles plus stricts en Italie et en Grèce, rapportait en janvier l’Agence France-Presse.
Romain Chauvet Le Devoir« La procédure d’asile est l’une des plus longues dans le système espagnol », explique Neyvi Tolentino, une avocate de Madrid spécialisée en immigration.

« La procédure d’asile est l’une des plus longues dans le système espagnol. Cela peut prendre des années, parfois trois, voire quatre ans », explique Neyvi Tolentino. « Compte tenu de ces délais, de nombreuses personnes abandonnent souvent le processus et cherchent d’autres solutions de rechange. » De plus, avec l’un des taux d’approbation d’asile les plus bas de l’UE, 18,5 % en 2024 contre une moyenne européenne de 42 %, l’obtention de l’asile n’est pas garantie.

Pour tenter d’accélérer le traitement des demandes, le gouvernement espagnol de gauche a récemment modifié la Loi sur l’immigration, mais il est encore difficile d’en connaître les effets. S’ajoute à cela le risque de voir tomber le gouvernement minoritaire de Pedro Sánchez, empêtré dans plusieurs scandales de corruption. Des élections anticipées pourraient porter la droite au pouvoir, et amener à un durcissement des politiques d’immigration, à l’image d’autres pays européens.

Vie en suspens
Pour Eliezer José Contreras Velásquez, la vie s’est arrêtée depuis le retour de Donald Trump à la Maison-Blanche. Ce Vénézuélien de 30 ans, qui avait quitté son pays en raison de la situation politique et de son orientation sexuelle pour s’établir au Pérou, avait été sélectionné par un programme de réinstallation des Nations unies pour les États-Unis.

« J’avais franchi toutes les étapes avec succès, et j’attendais simplement une date pour mon vol quand j’ai appris sur les réseaux sociaux que le programme était suspendu. » Lui qui avait déjà vendu ses effets personnels et quitté son emploi s’est retrouvé pris de court.
Eliezer José Contreras Velásquez

« J’en ressens encore les impacts psychologiques », explique le jeune homme. « Je peux comprendre qu’un pays modifie ses politiques d’immigration, mais si abruptement et sans offrir de plan B, c’est très difficile à vivre. » Eliezer songe maintenant à rejoindre l’Espagne.

« L’Espagne devrait travailler avec les autorités américaines pour aider ces gens-là qui ont déjà franchi toutes les étapes », pense Ana María Diez, la présidente de Coalición por Venezuela. Le gouvernement espagnol a annoncé travailler sur un plan pour accueillir la majorité des Latino-Américains partis des États-Unis, mais aucun détail n’a encore été dévoilé.

Selon elle, les mesures prises par le 47e président des États-Unis auraient aussi des répercussions sur les politiques migratoires en Amérique du Sud. « Nous avons vu d’autres pays essayer de copier ce que Trump met en place, comme l’Argentine, qui était historiquement un refuge pour les gens du monde entier », explique-t-elle. « Ça pourrait aussi pousser encore plus de gens à l’exil. »

*NOTA: Article publicat a Le Devoir de Montréal, 2 de juliol 2025

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